Une ambition nationale devenue européenne
A l’origine, une ambition nationale
Les premiers pas de la conquête spatiale en France sont motivés par une forte ambition nationale, impulsée par le Général De Gaulle. Lors de son voyage officiel en Guyane le 21 mars 1964, il déclare ainsi : « Nous avons à réaliser, vous sur place et la France avec vous, une grande œuvre française en Guyane, et une grande œuvre dont on s’aperçoive dans toutes la région du monde où se trouve le département. Il faut qu’on le voit et qu’on le sache partout. Nous avons commencé et nous continuerons. »
En novembre 1965, le premier lancement de Diamant depuis le site d'Hammaguir au Sahara a fait de la France la 3e puissance spatiale mondiale, derrière l'URSS et les États-Unis. Dans le contexte de la guerre froide, le Centre spatial guyanais doit permettre la poursuite du développement de Diamant.
C'est néanmoins une fusée-sonde qui s'élancera la première depuis la Guyane : le 9 avril 1968, à peine 4 ans après les débuts des travaux de construction, le CSG est opérationnel et la fusée Véronique décolle de son pas de tir kouroucien.
La naissance de l'Europe spatiale
Avec Diamant, la France a appris à maîtriser la propulsion liquide, mais cela n'est plus suffisant pour les ambitions nationales. Elle rejoint donc Europa, projet de lanceur géré par l'ELDO, le centre européen pour la mise au point et la construction de lanceurs d'engins spatiaux. Entreprise commune de 6 pays (Allemagne, Belgique, France, Italie, Pays-Bas et Royaume-Uni) dans le but de concurrencer les États-Unis sur le nouveau marché des télécommunications. Effectués sur le site de Woomera en Australie, aucun test du lanceur complet n'est concluant et l'Italie et le Royaume-Uni se retirent en 1972 du programme et de son nouvel objectif, Europa II. La seule version du lanceur décollera à Kourou et sera un échec qui signera la fin du programme, malgré le bon fonctionnement du site de lancement. Europa III ne verra pas le jour, et l'ELDO subit une crise à laquelle la France et l'Allemagne souhaitent remédier au plus tôt, afin de lancer les satellites de leur programme Symphonie que la NASA refuse de placer sur orbite.
Ariane, une ambition européenne
C'est en 1973 qu'un nouveau projet de lanceur rassemble à nouveau l'Europe. L3S, résultat des travaux du CNES pour le développement d'un lanceur plus simple et moins coûteux que le projet Europa III. Adopté lors de la conférence européenne de Bruxelles, le lanceur est baptisé Ariane.
L'Europe franchit une nouvelle étape le 30 mai 1975 et 10 pays fondent l'ESA, l'agence spatiale européenne, et ses 3 projets phares dont Ariane. L'ESA prend en charge 45 % du financement du CSG, qui se prépare alors pour accueillir Ariane. Le site de lancement d'Europa devient l'ELA1, l'ensemble de lancement Ariane 1. Trois salles blanches sont aménagées afin d'accueillir les satellites dédiés à Ariane 5 et attirer les premiers clients commerciaux comme Intelsat, géant des télécommunications américain qui confie un de ses satellites à Ariane avant même son premier lancement.
Le 24 décembre 1979, le premier lancement Ariane est un succès, plaçant sur orbite CAT-1, la capsule Ariane technologique première du nom. Bardée de capteurs, elle permer de fournir des données sur les conditions qu'un satellite emporté par Ariane doit supporter. Suite à ce succès, l'Europe mise son développement spatial sur Ariane. Si les premiers lancements ne sont pas tous des succès, la ferveur des pays européens pour Ariane croît, confirmant le choix proposé par le CNES de développer Ariane 2, 3 et de travailler sur Ariane 4 avant même le premier lancement Ariane 1.
En 1980, Arianespace voit le jour, faisant le CSG dans une nouvelle ère, celle d'un port spatial. Filière commerciale du CNES, Arianespace se présente comme une entreprise de transport et s'installe à Kourou, prenant en charge les lancements commerciaux d'Ariane à partir du 9e lancement.
La montée en puissance du CSG et de l'Europe spatiale
Particulièrement modulable et lancée pour la première fois en 1988, Ariane 4 est celle qui rend le CSG demandé pour les lancements scientifiques et institutionnels, et quasi incontournable pour les lancements commerciaux, largement freinés aux États-Unis par l'accident de la navette Challenger. Sous cette impulsion, le CSG grandit avec le soutien apporté par l'ESA, laquelle compte 15 membres à partir de 1995.
En 1996, Ariane 5 apporte quant à elle un nouvel argument pour le CSG, avec la capacité d'emporter deux satellites lourds en un seul lancement. Malgré son échec inaugural et celui de sa première version ECA, Ariane 5 s'inscrit dans la lignée d'Ariane 4, celle d'un des lanceurs les plus fiables au monde.
Afin d'élargir ses possibilités de lancement, le CSG s'internationalise davantage : Soyouz, le légendaire lanceur russe, et Vega, nouveau lanceur léger européen effectuent leurs premiers lancements respectifs en 2011 et 2012, tandis qu'Ariane lance la série des ATV, 5 cargos de ravitaillement de la station spatiale internationale.
En 2014 puis 2016, l'ESA désormais composée de 22 membres donne son soutien à Ariane 6 et Vega-C : partageant des éléments communs pour permettre une production en série, les nouveaux lanceurs européens ont pour mission de servir avec souplesse les marchés institutionnels et commerciaux. Tout en préparant d'ores et déjà l'avenir des lanceurs décollant du CSG...